Instaurée en 1982, la négociation annuelle obligatoire (NAO) est l'occasion de faire un point avec son employeur sur différents thèmes : rémunération, emploi des salariés, égalité hommes/femmes, conditions de travail... Inscrite dans la loi, la NAO est parfois méconnue du grand public, notamment à cause de ses modifications successives. Avec ce guide, on espère lever vos doutes et interrogations.
Cadre légal de la NAO
Quelles entreprises sont concernées par les négociations annuelles obligatoires ?
La NAO est profondément liée à la présence de représentants syndicaux. Ainsi, elles prendront place dans les entreprises de plus de 50 salariés lorsque celles-ci contiennent une ou plusieurs sections syndicales représentatives, ainsi que dans les entreprises de moins de 50 salariés, lorsqu'elles contiennent un délégué syndical.
Rappel : le syndicat doit atteindre la barre des 10% des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles afin d'acquérir sa représentativité.
Qui organise la NAO ?
En place dans toutes les entreprises de plus de 11 salariés où existe un délégué syndical, les NAO doivent être à l'initiative de l'employeur et se dérouler dans les 12 mois suivant les dernières NAO (au moins une fois par an donc). La loi ne prévoit pas de forme particulière, mais il est recommandé d'utiliser une lettre de convocation écrite afin de prévenir les participants, et d'y renseigner la date, le lieu, ainsi que toutes les informations que l'employeur souhaite transmettre.
En l'absence d'initiative de l'employeur, les organisations syndicales peuvent prendre le relais et demander l'organisation de la NAO. L'employeur dispose alors de 8 jours pour transmettre les convocations aux partenaires sociaux, puis dans les 15 jours qui suivent la convocation, l'employeur convoque les différents partenaires sociaux à la négociation.
À noter : en cas d'absence d'initiative de mise de place de NAO, l'employeur s'expose à un an d'emprisonnement et une amende de 3750 euros.
Thèmes des NAO
Suite à la reforme de la loi Rebsamen en 2015, les thèmes de la NAO ont été profondément bouleversés. La loi centralise désormais douze sujets originaux, regroupés au sein de 3 blocs thématiques.
Le premier concerne l'obligation de négocier :
- les salaires effectifs : les salaires bruts.
- la durée du travail, et notamment la réduction du temps de travail, la mise en place du temps partiel et l'organisation du temps de travail (astreinte, travail de nuit, heures supplémentaires, repos compensateur...)
- le partage de la valeur ajoutée : mise en place des primes d'intéressement et de participation, ainsi que l'épargne salariale. Si ces dispositifs sont déjà régis par un accord d'entreprise, leur négociation devient facultative.
Le second se concentre sur :
- l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes notamment en matière d'accès à l'emploi, de formation professionnelle, d'évolution de carrière, et de salaires.
- la lutte contre le sexisme au travail, la lutte contre l'exclusion des personnes handicapées, ainsi que la lutte contre les discriminations de toutes sortes, notamment en matière de recrutement, d'emploi ou d'accès aux formations professionnelles.
Enfin, le dernier bloc thématique porte sur :
- la préservation de la vie personnelle des salariés, notamment en termes de parentalité, de télétravail, de services proposés dans l'entreprise ou encore d'aménagement du temps de travail pour les salariés en charge d'un proche malade ou handicapé.
- l'expression des remarques des salariés concernant leurs conditions de travail.
- leur droit à la déconnexion.
L'idée reste d'échanger sur tous les sujets de la vie d'entreprise qui pourraient, en l'absence de discussions, aboutir à des conflits, à des tensions. Ainsi, il est encouragé d'aborder tous les sujets qui vous semblent pertinents.
Négociation triennale : dans les entreprises de plus de 300 salariés s'ajoute la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP). Elle doit s'effectuer au moins une fois tous les 3 ans.
En amont de la NAO
Qui participe à la NAO ?
Lorsque l'employeur, ou à défaut un représentant syndical, organise la NAO, il est l'heure pour les délégués syndicaux d'effectuer une sélection de salariés de l'entreprise afin d'en faire une délégation. À défaut d'accord s'applique la règle du "un pour un" : chaque délégué peut être accompagné par un salarié.
Ainsi sont invités à la réunion :
- l'employeur et/ou son représentant
- les délégués syndicaux
- les salariés sélectionnés par les délégués syndicaux
Une subtilité survient avec la taille de l'entreprise : dans les entreprises de 11 à 50 salariés, le seul délégué syndical peut être le délégué du personnel, pour la durée de son mandat, alors que dans les entreprises de plus de 50 salariés, chaque syndicat représentatif a la possibilité de désigner un délégué syndical.
Note : si la loi impose une NAO tous les ans, et une GEPP tous les 3 ans minimum, des accords dits "d'adaptation" peuvent permettre aux différents partenaires sociaux d'organiser leur propre périodicité de réunions, qui ne peut excéder 4 ans d'intervalle.
Bien préparer sa NAO
Afin de préparer les argumentaires de la NAO, les différents acteurs (délégués syndicaux et membres de la délégation) bénéficient d'heures supplémentaires au sein de leur entreprise : 10 heures par an dans les entreprises de 500 salariés et plus, et 15 heures par an dans les entreprises de plus de 1000 salariés. En outre, les membres de la délégation bénéficient également d'un droit à l'information : l'employeur est tenu de leur fournir les informations nécessaires au bon déroulement de la NAO (situation économique et financière de l'entreprise, éléments du bilan social annuel, informations relatives aux rémunérations et à l'emploi).
À noter : le temps passé en NAO est considéré, au même titre que les réunions du CSE, comme du temps de travail effectif.
Résultats de la NAO
À noter : pendant la durée de la NAO, l'employeur ne peut en aucun cas prendre de décisions unilatérales sur les sujets abordés, sauf en cas d'urgence qu'il devra justifier.
Si la loi impose une obligation de négocier, il n'est en revanche pas obligatoire de conclure des accords. Ainsi, la NAO peut aboutir à deux issues :
- les parties s'entendent et la NAO aboutit à un accord : il est nécessaire de réaliser un compte-rendu écrit et signé des accords réalisés. Par la suite, ce document devra être transmis à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) via la plateforme de télé-procédure du ministère du travail, et au conseil des prud'hommes.
- les parties ne s'entendent pas et la NAO ne permet pas de trouver des accords : un procès-verbal de désaccord doit être réalisé. Doivent s'y inscrire les propositions de chaque partie, les points de désaccord ainsi que leurs motifs (ainsi que les décisions prises unilatéralement par l'employeur s'il y en a eu). De la même manière que le document d'accord, le procès-verbal doit être transmis à la DREETS et au conseil des prud'hommes. Si, dans une volonté d'afficher leur désaccord, les délégués syndicaux et leur délégation refusent de signer le procès-verbal, ils sont dans leur droit. Malgré tout, leur non-signature n'entache en rien la validité du document.
En cas d'accord, une bonne pratique reste néanmoins également de réaliser un procès-verbal, afin d'avoir une trace visible des positions de chaque partie, et de garder en mémoire d'une réunion à l'autre les débats et engagements. Par la suite, si les parties sont d'accord, et dans un souci de transparence, ce procès-verbal pourra être communiqué aux salariés.
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